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Par Pascale Girard
Quand on fait de la recherche, on oscille souvent entre impatience, déconvenue, espoir, déception et ceci à répétition tant il est vrai que les avancées nécessitent un brassage de sources souvent considérable. Cependant, il y a quelques jours, j’ai reçu une belle récompense après une longue traversée du désert. Je farfouillais sur le site d’IMSLP à la recherche de nouveaux opus de Sebastian Lee. Le site est un wiki collaboratif et il est donc régulièrement mis à jour par des internautes comme moi qui y ajoutent de nouvelles sources. Des partitions réapparaissent et sont numérisées, puis répertoriées en ligne. Je fais donc mon petit travail de veille, et me vient l’idée de regarder également l’évolution de la page de Louis Lee (1822-1896), jeune frère de Sebastian. Louis était également violoncelliste et compositeur. Bien que résident à Hambourg, il était connu en France. La Gazette Musicale de Paris lui consacre plusieurs chroniques sur plusieurs années: on fait l’éloge de ses performance d’enfant prodige [1] ainsi que d’un quintet qu’il aurait composé et dont je n’ai pas encore retrouvé la trace.

Je me retrouve donc sur la page de Louis Lee et là, apparaît une nouvelle phrase surlignée dans la section des opus du musicien. Il aurait écrit une symphonie car elle est mentionné dans un livre que Google a eu la bonté de numériser et qui est consultable gratuitement [2]. Je retrouve page 16 la référence en question et découvre avec enthousiasme que le livre mentionne plusieurs Lee, dont ce cher Sebastian. S’en suit Louis dont j’évoquais la carrière précédemment et enfin, juste sous son nom, on découvre un Edouard Lee ainsi que la ligne suivante:

Lee Eduard, Sohn des Sebastian Lee, pianist aus Hamburg, starb schon den 23 . Dec. 1861, 26 jahre. Ce qui peut être traduit comme suit: Lee, Edouard, pianiste de Hambourg, déjà décédé le 23 décembre 1861 à l’âge de 26 ans. [2] Il est difficile de décrire avec des mots la joie d’une telle découverte pour quelqu’un qui passe des heures, des jours et maintenant même des années à brasser des sources à la recherche d’informations sur la vie et l’œuvre de Sebastian Lee. J’avais déjà retrouvé la fille de Sebastian Lee et Catarina Lee née Luther grâce à une mention dans l’acte de décès de Sebastian Lee car Caroline et son mari vivaient dans le même immeuble que Sebastian et sa femme Catarina lorsqu’il fût décidé de rentrer à Hambourg en 1870, juste avant les événements de la Commune et surtout de la guerre Franco-Prussienne. Voilà maintenant que je découvre un fils! Et musicien en plus! Oscar Paul, l’auteur de l’ouvrage ou figurent les informations, le qualifie de « pianiste » mais il était également violoncelliste car j’ai une partition de 1856 d’Edouard Lee qui a fait au moins une partie de sa carrière en France. S’il est né en 1835, Sebastian et Catarina étaient alors à Londres (ils s’installent à Paris en 1837). Je pense qu’Edouard avait reçu une éducation musicale qui incluait le violoncelle puisque sa partition, publiée en français chez S.Richault, est une sérénade pour chant, piano et violoncelle dont il a tout écrit, sans l’aide de papa.
A contrario, Maurice Lee (1821-1895), autre frère de Sebastian, qui était un pianiste et compositeur également très actif (la BNF a presque tout son catalogue) n’a jamais composé quoi que ce soit pour violoncelle, comme par exemple sa Gavotte Louis XV (opus 54) dont Sebastian écrira la partie de violoncelle. Si Edouard Lee a composé sa sérénade avec violoncelle, ce n’est pas un hasard. Certes, un compositeur peut techniquement écrire pour n’importe quel instrument sans en jouer, mais il ne s’agit pas là d’une symphonie. Edouard Lee a choisi le piano et le violoncelle pour composer ce rare opus parce-qu’il maîtrisait ces instruments.

De sa courte vie, Edouard Lee a réalisé, outre cette œuvre non-numérotée, 2 arrangements répertoriés au catalogue de la BNF

Par ailleurs, lancée sur la piste de la progéniture de Sebastian et Catarina Lee, j’ai retrouvé quantité de bébés Lee à Paris dans le fond des archives reconstituées de Paris. Ces archives ayant été perdues lors des grands incendies de La Commune, les actes ont été patiemment reconstitués sur une base déclarative et la présentation d’actes d’état civils à une commission qui a œuvré 30 ans pour reconstituer quelques uns des 8 millions d’actes perdus lors de l’incendie de l’Hôtel de ville le 24 mai 1871
Pas de trace de mon Edouard Lée, qui n’est peut-être pas né à Paris ou dont l’acte de naissance est perdu à jamais, mais il y a plusieurs foyers familiaux et la petite Clara Octavie, Eugénie, Marie Lée née le 5 mai 1856 fait peut-être partie des rejetons Lee qui nous intéressent (elle est née dans le 9ème arrondissement). Notre Sebastian a vécu principalement dans le 9ème arrondissement, tour à tour au 73, rue des Martyrs puis au 8, rue Jean-Baptiste Say à 350m de son précédent logement, dans le même arrondissement, mais à des dates antérieures, vérifiables à ce jour.

L’adresse de Sebastian Lee au 73, rue des Martyrs à Paris de 1861 à 1864 selon le registre publié de l’Association des artistes musiciens dont il était sociétaire. [3] Le numéro 73 se cache derrière le volet droit de la fenêtre du 1er étage à gauche (j’ai mis du temps à le trouver 😉 et aujourd’hui, un bâtiment, qui n’a pas l’air d’époque, héberge un sauna au rez-de-chaussée. Tout cela juste à côté de l’actuelle salle de spectacle le Divan du Monde.

Le 8, rue Jean-Baptiste Say à Paris, l’adresse des Sebastian Lee jusqu’en 1868 [3]
Les recherches continuent, et pas moyen pour le moment de mettre la main sur l’acte de décès d’Edouard Lée, que je supposais mort à Paris.

Des pistes s’ouvrent vers Londres et Hambourg. Affaire à suivre…
Pascale Marin
Références
[1] Gazette et Revue musicale de Paris, 1834 p456 – https://books.google.fr/books?id=sr5CAAAAcAAJ&printsec=frontcover&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false
[2] Handlexicon der Tonkunst, Volume 2 par Oscar Paul, 1873
[3] Registre IReMUS Institut de Recherches en Musicologie http://iremus.huma-num.fr/aam Association des Artistes Musiciens, Liste des sociétaires (1844-1876).
[4] Source: Revue et Gazette Musicale, décembre 1861 https://archive.org/details/revueetgazettemu1861pari/page/413/mode/1up?view=theater
The rediscovered son
19 November 2023
Written by Pascale Girard. Thank you to Sheri Heldstab and friends who kindly translated this article.
When I am doing research, I often bounce back and forth between impatience, dismay, hope and disappointment, and this occurs repeatedly because the progression of a research project demands the scouring of a considerable number of documents. A couple of days ago, after a long dry spell, my hard work paid off!
I was rummaging on the IMSLP website in search of new opuses from Sebastian Lee. IMSLP is a collaborative Wiki and is updated by contributors like me who upload new material. Scores may be uploaded from sources previously unknown and are then digitalised, classified, and posted online. While I was perusing IMSLP, I realized that I should also check for changes in content for Louis Lee (1822-1896), the younger brother of Sebastian. Louis was also a cellist and a composer, and while he resided in Hamburg, Germany, he was also famous in France. The Gazette Musicale de Paris, an important weekly musical magazine during the 19th century, wrote several pieces about him over a period of years: they praised his performance as a child prodigy and also praised a quintet that he composed (which I still haven’t found any trace of).

As I’m looking through Louis Lee’s content on IMSLP, I discover a new hyperlink in the section, seeking to gather the opuses of the musician. According to a book that Google was kind enough to digitalise and make available online, Louis Lee had composed a symphony. [2] I found the pertinent reference on page 16 and happily discovered that the book lists several people with the surname Lee, including our dear Sebastian, followed by Louis, whose career I have previously mentioned, and finally, just after Louis, there is an Edouard Lee with the following information after his name:

There are no words which adequately convey the joy of such a discovery for someone who spends hours, days, and now years shuffling through sources in search of information about the life and work of Sebastian Lee. Thanks to a mention in his death certificate, I had already found Sebastian Lee and Catarina Lee nèe Luther’s daughter, Caroline, because Caroline and her husband were living in the same building as Sebastian and his wife when they decided to move back to Hamburg in 1870, just before the Franco-Prussian war (1870-1871).
Now I have discovered another son! And a musician on top of it! Oscar Paul, the author of the book where I found the information about Edouard Lee, describes Edouard as a “pianist” but I know he was also a cellist, as I have a score published in 1856 from Edouard Lee who spent at least part of his career in France. If he had been born in 1835, Sebastian and Catarina would have been in London at that time (they settled in Paris in 1837). I think Edouard received a musical education which included cello as well as piano, since his score, published in French by S.Richault, is a Serenade for vocals, piano, and cello in which Edouard wrote every part without help from dear old Dad!
Sebastian’s brotherMaurice Lee (1821-1895), who was a pianist and a prolific composer (the French National Library [BNF] has a lot of his work) never composed anything for cello. In Maurice’s Gavotte Louis XV (opus 54), Sebastian was credited with writing the cello part. If Edouard composed his Serenade with a cello part, it is not by chance. Admittedly, a composer can technically write for any instrument without necessarily being able to play the instrument, but this was not a symphony. I believe Edouard Lee chose piano and cello in composing this rare opus because he mastered both these instruments.

During his short life, Edouard Lee wrote two other works listed in the BNF catalogue in addition to that shown above.

Now that I was looking for the offspring of Sebastian and Catarina, I found quite a few Lee children in the reconstructed Paris civil archives. These archives were lost during the big fires of La Commune, and have now been patiently put back together by a commission that worked for 30 years reconstructing some of the 8 million certificates lost during the Paris Town hall fire on 24 May 1871.
Unfortunately, there was no trace of my Edouard Lee, who may not have been born in Paris or whose birth certificate may be lost forever, but there are several Lee households and young Clara Octavia Eugenie Marie Lee, born on the 5th of May 1856, could well be one of the younger Lees we are interested in (she was born in the 9th district of Paris). Sebastian Lee lived mostly in the 9th district, first on 73 rue des Martyrs and then on 8 rue Jean Baptiste Say, approximately one-quarter mile away from his previous apartment, in the same district, on previous dates that I have verified.


The research continues, but at the moment, I have no way to get a hold of Edouard Lee’s death certificate, assuming he died in Paris.

My current research is now leading me towards London and Hamburg. To be continued…
Pascale Marin
Références
[1] Gazette et Revue musicale de Paris, 1834 p456 – https://books.google.fr/books?id=sr5CAAAAcAAJ&printsec=frontcover&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false
[2] Handlexicon der Tonkunst, Volume 2 par Oscar Paul, 1873
[3] Registre IReMUS Institut de Recherches en Musicologie http://iremus.huma-num.fr/aam Association des Artistes Musiciens, Liste des sociétaires (1844-1876).
[4] Source: Revue et Gazette Musicale, décembre 1861 https://archive.org/details/revueetgazettemu1861pari/page/413/mode/1up?view=theater























